Notre chantier a commencé cette semaine par les fondations en pieux métalliques vissés ; ce choix de conception est intervenu dès le début ; sur un bâtiment si petit, 200m2 surface de plancher en R+1, nous voulions limiter l’impact des fondations dans le bilan environnemental, le coût carbone mais aussi les terrassements, les nuisances, les déchets ;
Au démarrage de la conception, nous avions regardé les dalles chaux chanvre, terre etc mais nous avons rapidement abandonné car au vu des caractéristiques géotechniques des remblais et de nos charges d’exploitation importantes (bibliothèque en rez-de-chaussée 400kg/m2) nous devions être en plancher porté. Fin des dalles ;
Nous avons ensuite décidé de recourir aux pieux métalliques vissés, moins impactant pour les émissions de CO2 que des fondations béton ; en esquisse, gain CO2 estimé à plus de 50% par notre AMO en charge de l’analyse de cycle de vie ; et autres avantages : des fondations réversibles et réutilisables en fin de vie, on les dévisse ; et aussi, un chantier sec, sans terrassement, quasi zéro dechets et à faible nuisance !
Mais si la décision fut facile à argumenter, il nous a fallu trouver le chemin contractuel et réglementaire car le géotechnicien de l’opération (titulaire du marché à bons de commandes) nous a rapidement expliqué qu’il n’était pas en capacité de préconiser ce type de fondations, car il ne les connaissait pas ; échanges, réunions, explications et nous avons finalement trouvé un moyen terme : le géotechnicien a accepté de préconiser des fondations en béton et d’indiquer qu’au vu du terrain, des fondations type pieu métal vissé étaient envisageables sous réserve des engagements et calculs de l’entreprise ;
Plus d’ouverture du coté de notre bureau de contrôle qui a accepté de nous accompagner avec une mission de contrôle un peu plus poussé au regard du caractère non courant de la technique ;
Une bonne phase de benchmark, des échanges avec des confrères, des bureaux d’études géotechniciens, des entreprises et nous voilà parties dans la rédaction d’un CCTP ad hoc pieux vissés et validation de notre BCT. Les eurocodes ouvrent la porte à cette technique sous réserve d’un certain nombre de tests et calculs pointus conformes aux eurocodes….mais cela doit être possible et c’est une technique courante dans certains pays comme le Canada .
Après quelques péripéties contractuelles hors sujet, le chantier sera finalement attribué à l’entreprise Technopieux, titulaire du seul avis technique valable en France actuellement ;
Une phase d’essais préalables, un test à la compression et un test au cisaillement pour valider la portance des pieux sur le sol du site ; la portance est calculée uniquement avec la résistance du sol sur l’hélice qui est directement déduite de la pression exercée par le vérin hydraulique (la petite pompe minuscule qui peut envoyer 30 T) – à partir des résultats des essais, le tableau de correspondance de l’avis technique permet de déduire la portance ;
en mise en œuvre, le facteur limitant est en fait plus souvent la puissance de la machine qui visse à 15T maxi – avec une machine d’1m40 de large. Si la charge dépasse 15 tonnes par appui, les pieux sont doublés.
Dans notre cas, les essais en compression ont été excellents mais les essais en cisaillement ont donné des valeurs conformes mais un peu limites et il a été décidé de recourir à un diamètre un peu plus grand pour les pieux isolés ; les nouveaux essais avec un pieu de diamètre à peine supérieur, ont permis de réduire le risque de déplacement sous charge horizontale (vent) de moitié, soit 3mm.
Chantier rapide, mise en œuvre en une semaine des 39 pieux ; le vissage des 39 pieux en 2 jours puis recepage et mise en place des chevêtres.
Budget maîtrisé et dans notre cas, bien moins cher que le devis que nous avions pour les fondations en béton ; environ 450 euros/pieu de 4m hors sujétions liées aux chevêtres des doubles pieux
Durabilité/corrosion : une surépaisseur dite « zone sacrificielle » permet de garantir une durée de vie de 50ans ; une protection cathodique est également prévue sur demande ; dans notre cas, 2 épines cathodiques enfoncées dans le sol et reliées à un des pieux avec une alimentation électrique faible 24 volts/an soit 1 heure de téléphone ; un seul pieu est relié car notre structure primaire est métallique donc les pieux sont tous reliés par un matériau conducteur ; une notice de calcul du voltage et du nombre de spins nécessaires est transmise pour validation au bureau de contrôle.
Les limites : au vu des charges reprises, la technique est adaptée aux structures R+2 ou R+3 (structure bois) maxi